Un fragment écarté de la rédaction définitive du Cinquième évangile, mais paru dans le numéro des Loups de novembre 1910 (et republié dans le n° 24 des CAHR).
La Généalogie de Jésus de Nazareth,
fils de Socrate et fils d'Isaïe
Socrate, celui qui ne demandait point d'argent pour dire la vérité et qui proclamait: « Personne n'est méchant volontairement », fut père d'Antisthène le chien.
Antisthène fut père de Diogène et de ses frères, les autres sages qui mendiaient.
Diogène fut père de Cratès, le riche qui vendit ses biens et distribua l'argent aux pauvres.
Cratès fut père de Zénon, le petit phénicien qui ne voulait pas qu'on élevât aux dieux des temples bâtis de mains d'hommes.
Zénon fut père de Cléanthe le puiseur d'eau.
Cléanthe le puiseur d'eau fut père de Chrysippe.
Chrysippe fut père de plusieurs dont les noms sont perdus et, après quelques générations, l'un d'eux fut père de Panthéros duquel est né Jésus le sage grec qui vécut exilé sans connaître son exil.
Mais Amos, celui qui avait désir et terreur du jour de l'Eternel, fut père d'Isaïe.
Isaïe, le voyant de gloire, fut père de Jérémie, le voyant de deuil.
Jérémie fut père d'Ezéchiel le cynique aux gestes inharmonieux et puissants.
Ezéchiel fut père de l'inconnu qui écrivit le livre de Daniel. Mais celui qui écrivit le livre de Daniel fut père, selon l'esprit de Marie.
Et Marie fut mère charnellement de Jésus, le juste israélite que les prêtres, les soldats, les juges et les autres ennemis de la justice attachèrent sur une croix.
Or, ce Jésus, qui fut la rencontre humaine du fleuve de sagesse grecque et du torrent de justice israélite, n'est-il point le même que quelques juifs appellent Messie, que quelques hellénistes nomment Christ.
Et que des païens mal convertis, incapables de se contenter d'un seul Dieu, proclament dieu à l'égal de Dieu ?
Han Ryner